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La conquête Française
(1830-1857)
Bouna
et la concession de corail du Bastion de France (Vieille Calle)
ne sont pas étrangers au conflit franco-algérien qui conduira
au fameux "coup d'éventail" porté par le dey Hussein au Consul
de France en 1827, puis l'expédition d'Alger en 1830.
En toile de fond : des cargaisons de blé livrées à crédit à la
première République Française entre 1793 et 1798 par les négociants
Juifs Algérois d'origine Livournaise, Bacri et Busnach. Pour
ces transactions, le dey leur avait avancé les fonds nécessaires. Ces derniers persuadèrent le dey qu'ils
ne pourraient le rembourser que lorsqu'ils seraient eux-mêmes
payés et transformèrent ainsi leurs créances particulières en
créances d'Etat. Mais la France tarde à honorer sa dette sauf
une partie en 1819 (7 millions sur 14). Or les Bacri-Busnach avaient
eux-mêmes d'autres dettes et leurs créanciers mettaient opposition
aux paiements. Les sommes ainsi débloquées par le Trésor Français
n'ont put être reversées au dey. Le litige entre les deux pays
traîna en longueur durant 30 années. Pour aggraver encore les
rapports entre les deux pays, en 1825, le Vice-consul, Alexandre
Deval, fut accusé de trafique d'armes au Bastion de France. En représailles, les établissements du Bastion ont été détruits, son domicile à Bouna dévasté et au même moment, des bâtiments français sous pavillon pontifical auraient été saisies par les corsaires algériens. Tous ces événements vont être en partie à
l'origine de cet incident de l'orageuse séance du 30 avril 1827.
Que s'est-il alors exactement passé ce jours là ? Le conseiller du dey, présent au moment des faits, témoigne dans son ouvrage rédigé et publié dès 1833 : A l'occasion
de la fête de l'Aïd, Pierre Deval, Consul de France, est reçu en audience par le dey. Les deux interlocuteurs s'entretenaient
en turc, sans interprète. Après la cérémonie, Hussein évoqua le contentieux financier entre les deux pays et demanda au Consul pourquoi son gouvernement
ne répondait pas à ses nombreuses dépêches concernant les réclamations
de Bacri (en outre, Pierre Deval jouissait
d'une réputation douteuse. Le dey le soupçonnait déjà de s'être partagé les 7
millions avec les Bacri-Busnach et l'accusait d'avoir insinué son
Ministre de ne pas lui écrire). La réponse de Deval fut on ne peut
plus insolente, et conçue en ces termes : "Mon gouvernement ne
daigne pas répondre à un homme comme vous". Est-ce par ignorance
de la langue, s'interroga le conseiller du dey, ou par mépris que le diplomate français répondit
ainsi à un chef d'Etat en présence de toute sa cour ? Quoiqu'il
en soit, ces paroles froissèrent tellement l'amour-propre du dey,
qu'il ne put être maître d'un premier mouvement de colère, et
lui asséna un coup d'éventail. Deval offensé, adressa le soir même
son rapport à Paris. Il déclarait avoir été frappé sans provocation
et demandait qu'on donnât à cette affaire "la suite sévère et
tout l'éclat qu'elle méritait". L'honneur du pavillon royal est
en jeu. Paris envoie une division navale à Alger pour obtenir
une réparation solennelle pour l'injure faite au roi Charles X
dans la personne de son représentant. Arrivé à Alger le 12 juin
1827, le Capitaine de vaisseau demanda que l'oukil du dey (représentant
du dey) vînt faire des excuses à bord et que le pavillon de France
fût arboré et salué à coups de canon. Le dey qualifia ces exigences
de ridicules, et fort de son droit de créancier impayé, refusa
toutes conciliation. La rupture entre les deux pays est consommée.
Le 16 juin 1827, les côtes algériennes sont déclarées par la France
en état de blocus. Deux jours après, en
représailles, les établissements la Calle furent réduits en cendre. Après trois ans de vaines négociations, entrecoupées
d'incidents graves, les circonstances ne laissaient plus d'autre
issue que l'action militaire, le débarquement. L'expédition d'Alger,
à côté des circonstances occasionnelles, avait des causes profondes.
D'un point de vue politique internationale, c'était l'occasion
pour la France d'affirmer son influence dans la Méditerranée menacée
par celle de l'Angleterre. Son prestige se verrait également renforcé
en se réservant la noble mission de délivrer la France et l'Europe
du triple fléau que les puissances chrétiennes ont enduré trop
longtemps : l'esclavage de leurs sujets, les tributs que le dey
exige d'elles et la piraterie qui ôte toute sécurité aux côtes
de la Méditerranée. D'un point de vue politique interne, l'expédition,
d'ailleurs assez contestée par l'opposition, est surtout un moyen pour
le régime de Charles X, englué dans une crise politique, de redorer
son blason. Et enfin, pour légitimer l'expédition militaire, les
politiciens français préféraient parler de mission "libératrice"
et "civilisatrice". L'armée française part, en effet, en Algérie pour débarrasser
les Algériens de la tyrannie turque et sortir le pays de sa longue
léthargie...
A
l'aube du 14 juin 1830, les premiers canots français accostent
sur la plage Sidi Ferruch. Les cavaliers algériens ne peuvent
résister longtemps face à une armée de métier puissamment armée.
Le 5 juillet 1830, le dey d'Alger, signe la convention de capitulations,
inaugurant ainsi, presque jour pour jours, 132 ans de colonialisme
français. Port stratégique du littoral constantinois, Bouna fut
la seconde ville à subir l'assaut français, trois semaines après
la reddition du dey d'Alger. Face à la situation confuse qui secoua
l'Algérie après la capitulation d'Hussein dey, la souveraineté
de la Régence fut disputée par les beys des autres provinces,
en particulier par Bou Mezrag, bey du Titteri, et par le second
personnage de la Régence, Hadj Ahmed, bey de Constantine. Pour
mettre un terme à ces querelles, les notables du pays et tous
les hommes de loi s'assemblèrent et proclamèrent Hadj Ahmed nouveau
Pacha, représentant du Sultan de Turquie. Renforcé par cette confirmation,
Ahmed pacha invita tout le reste de la Régence à se soumettre
à lui, et en effet ils se soumirent. Quant aux gouverneurs de
Bouna, ils contestèrent l'autorité du nouveau Pacha et décidèrent
de rompre définitivement avec le beylik de Constantine. Les nouveau
maîtres de Bouna, préférant la tutelle française plutôt que celle
du bey de Constantine, n'opposèrent donc aucune résistance face
à l'accostage des navires français. Cet acte, qualifié
de trahison, provoqua l'hostilité des citadins pro-Ahmed bey et
des tribus voisines. Telle était la situation explosive qui divisa
la population de Bouna et facilita la pénétration de l'armée française.
Le bey de Constantine envoie alors une cavalerie armée à leur tête, entre autres, Ali Ben Aïssa, pour assiéger
la ville et mettre la main sur la garnison turque coupable d'avoir
livré la ville au Français. Après deux longues années de siège,
Bouna passe définitivement à la solde de la France après la prise
de la Qasba le 27 mars 1832. Mais, derrière les Turcs, l'armée
française ne devait pas tarder à découvrir l'hostilité des tribus
kabyles et arabes. La pacification de l'Algérie fut obtenue au
bout de 27 longues et terribles années et au prix de la systématisation
des razzias par le Général Lamoricière et la politique de la terre
brûlée du Maréchal Bugeaud, notamment dans la province d'Oran où le principal agitateur fut l'Emir Abdelkader qui tenu un si grand rôle dans l'histoire de la conquête de l'Algérie…
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